Dans le cadre des grands dîners débat organisés par CroissancePlus avec des personnalités politiques ou sociales, les membres de l’association avaient rendez-vous à Bercy avec Christine Lagarde, pour un dîner soutenu par Deloitte.
Finalement c’est Hervé Novelli, qui remplaçait au « pied levé » la ministre… pour recevoir les 200 dirigeants d’entreprise de croissance. Hervé Novelli, secrétaire d‘état chargé du commerce, de l’artisanat, des PME, du tourisme et des services, était accompagné de François Drouin, pdg de l’OSEO.
3 propositions pour le discours d’ouverture
Comme à son habitude avec les personnalités du monde politique, l’association profitait de cette occasion pour faire des propositions au gouvernement, avec toujours les mêmes objectifs d’améliorer l’écosystème du pays, sa compétitivité et son attractivité.
(merci à mon piètre photographe Philippe Rodriguez, bien meilleur en e-commerce qu'en prise de vue)
Ainsi, Frédéric Bedin, dans son discours d’ouverture proposait 3 pistes pour accroître la compétitivité des entreprises françaises :
1°) la baisse des prélèvements obligatoires qui pèsent sur les entreprises. Il est en effet important qu’on atteigne une harmonie sur le sujet au niveau européen. La France devrait être alignée sur ses voisins pour ne pas être pénalisée. Pour cela il faudrait passer de 35% à 29% le montant de ces charges.
2°) l’accentuation de l’allègement des charges salariales pour permettre au sein de nos entreprises une hausse des salaires. Cette mesure devra forcément être compensée par un autre prélèvement, pourquoi pas la TVA…
A cette proposition le Ministre répondra plus tard que cela n’a jamais porté chance aux politiques qui ont tenté de mettre en place une TVA sociale…
3°) la réduction de la surface de l’état pour favoriser la création et l’émergence d’entreprises de taille intermédiaire (ETI). Il s’agit ainsi de rendre privés certains pans de l’activité économique assumés à l’heure actuelle par les services publics. En son temps cela a permis la création de sociétés comme Véolia ou Areva.
Le discours de Hervé Novelli : 5 dispositions pour les PMEs et focus sur l’innovation
Lors de son discours devant l’assemblée d’entrepreneurs de croissance, Hervé Novelli a souligné qu’il était toujours attentif aux prises de paroles de CroissancePlus qui était systématiquement source de propositions.
En fait, le but de l’association est de faire valoir notre point de vue d’entrepreneurs forts créateurs d’emplois, structuré en propositions concrètes (même si nous n’avons pas un rôle officiel de partenaire social).
Puis le Ministre a rappelé le dispositif qu’il a mis en place dans ce contexte de crise et son plan de relance.
Premièrement le régime d’auto-entrepreneur mis en place depuis le 1er janvier 2009, rencontre déjà un vif succès : il a généré de près de 60 000 créations d’entreprises individuelles. Pour le ministre, « c’est un succès qui souligne l’appétit d’entreprendre ». Mais, il précise que « s’il y avait une volonté d’entreprendre en France et que 327 000 entreprises avaient été crées en 2008, il fallait savoir que 87% de ces entreprises n’avaient pas de salariés en dehors de l’entrepreneur, lui-même ».
Je dois dire que je suis partagé sur le sujet. Je ne peux qu’être ravi de la simplification des formalités pour créer une entreprise en France (Certains affirmaient que c’était une des très grandes différences entre les américains et nous). Mais, je ne suis pas du tout convaincu que cela soit le Nirvana pour autant. Je parle de Nirvana parce qu’en Inde la moitié de la population active est auto-entrepreneur, mais ceux que j'y ai rencontrés étaient quasiment tous pauvres. Et aujourd'hui je sais que sur le lot des auto-entrepreneurs français, qui ont créé leur « auto-entreprise », nombres n’arriveront pas à aller au bout du rêve. Je crois qu’il faut penser à un accompagnement pour les personnes,
disposant d’une vraie bonne idée « métiers », qui n’ont pas forcément
les connaissances économiques et administratives indispensables à la
survie d’une structure commerciale.
Dans le cas contraire ne seront-ils pas seulement des gens qui sortent des rangs des « chômeurs » pour devenir des « entrepreneurs pauvres » ?
Aujourd’hui je pense qu’il est plus facile de créer une entreprise en France avec les dispositifs mis en place ces derniers mois mais que le vrai problème n’est plus de créer des sociétés, mais de les développer.
J’avais écrit un billet très court sur le sujet ici en janvier
Deuxième élément du dispositif rappelé par Hervé Novelli, la réactivité des pouvoirs publics envers les PMEs face à la crise. Ainsi l’état a confié 5 milliards d’euros à OSEO pour les PMEs dès le 2 octobre. Une belle somme complétée par 12 milliards d’euros de trésorerie transférés de l’état vers les entreprises sous forme d’accélération de remboursement de crédit d’impôts recherche, de TVA, de paiement de factures, …
A force d’entendre parler de tous ces milliards et toutes ces aides pour les PMEs, et de ne trouver aucun soutien de qui que ce soit dans « ma petite entreprise qui pourtant connaît la crise… », j’ai décidé de passer un moment en tête à tête avec le patron de l’OSEO en fin de conférence.
Le doute m’habite : Est-ce que je m’y prends mal ? Dois-je faire appel à un cabinet de levée de subventions ? Le statut de gazelle permet-il un certain soutien ? Avoir été Deloitte Fast 50 trois années consécutives ne devrait-il automatiquement nous classer dans une catégorie de PME à chouchouter pour leur faire passer les plafonds de verre de notre écosystème, afin qu’elles puissent continuer à innover et à se concentrer sur leur métier en créant des emplois ?
Aujourd’hui, je sais que ce sont des préoccupations partagées par de nombreux entrepreneurs isolés qui passent déjà tout leur temps dans la gestion et le fonctionnement de leur PME .
Troisième élément du discours, la médiation du crédit. On parle bien sûr de la mission de René Ricol (voir mon billet ici ) . Il parait que dans certains cas, il suffit d’évoquer son nom pour faire basculer une négociation avec un banquier qui serait trop conservateur.
Quatrième point, la loi de modernisation de l’économie sur les délais de paiement. L’écart entre la France et l’Allemagne serait de 20 jours. Cela signifie que les PMEs françaises souffrent de 20 jours de manque de trésorerie en comparaison avec leurs homologues outre Rhin.
Une modernisation loin d’être inutile ! En effet, la plupart des entrepreneurs dans la salle faisait un constat : leurs factures doivent en théorie être payées à 60 jours ou 45 jours fin de mois par les grands comptes, mais le délai d’obtention du bon de commande permettant d’émettre la facture a été rallongé d’autant, rendant la loi inefficace. Nous vivons donc un déplacement du problème mais pas sa résolution.
Cinquièmement, la loi TEPA qui permet de défiscaliser une partie de son ISF quand on investit dans les PMEs. Cela a permis de renforcer les fonds propres des PMEs de 1 milliard d’euros en 2008. Ce n’est pas rien puisque cela représente le double des investissements en capital risque de 2007.
92 000 personnes assujetties à l’ISF ont fait ces investissements au profit des PMEs françaises, se transformant ainsi en business angels à la française.
Voici donc, chers amis entrepreneurs, ce que j'ai retenu de cette soirée au Ministère de l''Economie et des Finances. Je publierai, sans doute d'ici la fin du week-end, la suite de mes notes concernant le point de vue du ministre au sujet du rôle et de l'importance de l'innovation, puis un extrait des questions-réponses qui ont suivi le débat.